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La tentative d’assassinat de Le Flanchec
Le 1er janvier 1925, une tentative d’assassinat est menée par des briseurs de grèves contre Daniel LE FLANCHEC (maire de Douarnenez très engagé dans les grèves). Blessé à la gorge, hospitalisé à Quimper, il revient le 5 janvier 1925 sous les acclamations des grévistes.
Témoignage audio : « Mélanie, syndicaliste », enregistrée par Nicole Le Garrec, 1977
Charles Tillon
Un syndicaliste à DouarnenezFort de la victoire des Penn Sardin, il œuvre sur toute la façade atlantique auprès des ouvrières pour améliorer leurs conditions de travail.
Pendant la seconde guerre mondiale, Charles Tillon devient commandant en chef des FTP (Francs Tireurs Partisans) puis ministre sous le gouvernement De Gaulle.
*femmes d’usines de Douarnenez
TABLEAU
La révolte des Sardinières, Tillon Charles 1926 – Musée de Bretagne
Extraits « Charles Tillon ; le chef des FTP trahi par les siens », Fabien Tillon, éditions Seuil, 2021
« Charles se multiplie pour une cause qui, dès les débuts, l’électrise et l’envoûte. Il participe à la naissance des cantines populaires, suscite la solidarité dans toute la Bretagne, parmi les paysans, les ouvriers d’autres secteurs, bientôt dans toute la France. Il cherche, avec Le Flanchec et une poignée de députés de gauche, à réunir les moyens de subsistance nécessaires pour garder au chaud les milliers de famille qui sont entraînées dans la lutte. Avec le Comité de grève, il improvise une chaîne de solidarité dans tout le pays, presse, municipalités, coopératives, militants, particuliers… L’affaire devient nationale, et, pour la CGTU, prend les formes d’un combat exemplaire.
…
Il multiplie les tournées sur la côte, à vélo, de Loctudy à Kerity-Penmarch, de Pont-l’Abbé au Guilvinec, tentant d’étendre les avancées obtenues à d’autres usines…»
M. Bordennec
Un marin dans la grèveLe port de Douarnenez compte près de 500 chaloupes et 5000 marins.
En 1924, ils restent à terre et soutiennent la grève.
Chanson : « Mec’hed ar friturioù »
Chanté par Pierre-Yves Pétillon, accompagné à la vielle par Michel Colleu, 2022. Le texte est celui recueilli par Herlé Denez en 1995 auprès de Renée Berlivet, qui l’a appris chez Pennamen ; version publiée dans Mémoire de la Ville en 1996, n° 26, p. 9. La mélodie et un couplet ont été transmis par René Losq le 29/05/2021. Il a entendu la chanson en travaillant le poisson à bord du mauritanien Tarentelle (DZ3969) en 1961, elle était chantée par Alexandre Le Moan.
Lien vers https://raddo-ethnodoc.com/raddo/document/3243543
1 – Merc’hed Eugène Jacq zo begoù bras
Brasoc’h o beg evit ur votez koad
R – Jouez là et là-bas Hag ar sac’h war e benn
Et le rin trin trin Et l’argent du meunier
2 – E ti Pennamen zo leun a c’hwen
Emaint ’doug an deiz gant o morzenn
3 – E ti Lozac’hmeur emaint div-ha-div
É pignat ar grec’henn emañ ar galeoù
4 – Merc’hed Penanros zo reñfermet
emaint diwallet deus ar paotred
5 – Merc’hed Chemin zo merc’hed lor
Enjoentiñ ar marc’h da gouezhet en aod
6 – E ti Marlière o deus bronnoù bras
A daol anezho a dreist o skoaz
7 – Hag e ti Guy zo seurezed
Emaint ’doug an deiz gant ur chapeled
Traduction : 1 – Les filles de chez Eugène Jacq sont de grandes gueules / Leurs bouches sont aussi grandes que leurs sabots de bois // R – Jouez là et là-bas et le sac sur sa tête… // 2 – Chez Pennamen leurs têtes sont pleines / Toute la journée avec leurs torpilles (genre de poisson) // 3 – Chez Lozac’hmeur elles sont deux par deux / Grimper la montée c’est le bagne // 4 – Les filles de Penanros sont renfermées / Elles sont préservées des garçons // 5 – Les filles de Chemin sont des filles sales / Enjoignent le cheval de ne pas tomber sur la plage // 6 – Chez Marlière elles ont de grosses poitrines / Elles les jettent par-dessus leurs épaules // 7 – Et chez Guy ce sont des (bonnes) sœurs / Toute la journée elles font leurs chapelets.
Mme JULIEN
Membre du comité de grèveSans salaire, la population s’organise pour tenir et subvenir aux besoins de la famille.
Mme JULIEN s’occupe de la caisse de solidarité, de l’organisation de la soupe populaire.
Chanson : Tan pinvidik e penn an dig
Chanté par Les Voisines, La Cale, 2022
Le 1er couplet (paroles et musique) a été recueilli à Douarnenez par René Pichavant, qui l’a publié dans Champilla en 1978. Les couplets suivants ont été « douarnenisés » par Les Voisines à partir de deux versions chantées au Guilvinec dans les conserveries.
1 – Tan pinvidik e penn an dig
Tan pinvidik e penn an dig
Hag en deus graet ur ploñj a pik
Hag en deus graet ur ploñj a pik
Hag en deus graet ur ploñj a pik
Charmante brune
Hag en deus graet ur ploñj a pik
E penn an dig
2 Tan pinvidik war penn an dig (bis)
Ar merc’hed yaouank a ’deus lik (bis)
Ar merc’hed yaouank a ’deus lik (bis)
Charmante brune
Ar merc’hed yaouank a ‘deus lik
E penn an dig
3 Tan pinvidik ’ba’ lost an dro…
Ar merc’hed yaouank a ‘deus tro…
’Ba’ lost an dro…
4 Tan pinvidik ’kichen Porzh Gad…
Merc’hed yaouank o riboulat…
’Kichen Porzh Gad…
5 Tan pinvidik war ar Flimioù…
Ar merc’hed yaouank a ‘deus liv…
War ar Flimioù
6 Tan pinvidik war ar Rosmeur…
Ar merc’hed yaouank a ‘deus fleur…
War ar Rosmeur
7 Tan pinvidik e ti Micheline…
Setu n’em gavet ar Voisines…
E ti Mich’line
1 Tan pinvidik au bout de la digue / Et il a fait un plongeon à pic /Au bout de la digue // 2 au bout de la digue Les jeunes filles ont le hoquet // 3 Au bout du virage / Les jeunes filles ont du tour (avoir une habilité particulière) // 4 Près de Porscad / Les jeunes femmes font la fête // 5 Sur le Flimioù / Les femmes ont des couleurs // 6 Sur le Rosmeur / Les jeunes filles ont des fleurs // 7 Chez Micheline / Voilà les Voisines.
La victoire des sardinières
La grève se termine le 8 janvier 1925. Elle a duré 46 jours. Les femmes obtiennent 1F l’heure au lieu des 80 cts, les heures de nuit majorées, la reconnaissance du droit syndical.
Une grève de femmes victorieuse qui rayonnera bien au delà de Douarnenez.
Chanson : « La chanson des Penn Sardin »
Il fait encore nuit elles sortent et frissonnent
Le bruit de leurs pas dans la rue résonne.
Écoutez l’bruit d’leurs sabots
Voilà les ouvrières d’usine
Écoutez l’bruit d’leurs sabots
Voilà qu’arrivent les Penn Sardin
À dix ou douze ans sont encore gamines
Mais déjà pourtant elles entrent à l’usine.
Du matin au soir nettoient les sardines
Et puis les font frire dans de grandes bassines
Tant qu’il y a du poisson il faut bien s’y faire
Il faut travailler il n’y a pas d’horaires
À bout de fatigue pour n’pas s’endormir
Elles chantent en chœur il faut bien tenir
Malgré leur travail n’ont guère de salaire
Et bien trop souvent vivent dans la misère
Un jour toutes ensemble ces femmes se lèvent
À plusieurs milliers se mettent en grève
Écoutez l’bruit d’leurs sabots
Ecoutez gronder leur colère
Écoutez l’bruit d’leurs sabots
C’est la grève des sardinières
Dans la ville rouge on est solidaire
Et de leur victoire les femmes sont fières
À Douarnenez et depuis ce temps
Rien ne sera plus jamais comme avant
Après six semaines toutes les sardinières
Ont gagné respect et meilleur salaire
Ecoutez l’bruit d’leurs sabots
C’en est fini de leur colère
Ecoutez l’bruit d’leurs sabots
C’est la victoire des sardinières
JOSEPHINE PENCALET
"Votez Joséphine"Engagée dans la grève, Joséphine PENCALET va marquer l’Histoire en devenant l’une des 10 premières femmes françaises à siéger dans un conseil municipal en mai 1925. Les femmes n’ayant pas encore le droit de vote, son élection est invalidée en novembre 1925.
Née à Douarnenez en 1886 d’un père marin et d’une mère « femme de friture », Joséphine Pencalet reflète la condition ouvrière de la ville. Ouvrière de conserverie, elle participe à la grève au côté de plus de 2000 ouvrières et ouvriers. C’est dans ce contexte qu’elle signe son premier engagement en adhérant au syndicat CGTU. Au printemps 1925, moins de quatre mois après le dénouement victorieux du conflit, son nom est placardé sur les murs de Douarnenez : elle est candidate à l’élection municipale sur la liste de Daniel Le Flanchec. Le 3 mai 1925, la liste communiste triomphe en remportant 26 des 27 sièges au 1er tour. Joséphine Pencalet est ainsi proclamée élue. La situation est inédite : alors que les Françaises sont dépourvues des droits politiques, une femme est pour la première fois élue. Au total, elles sont dix dans ce cas en France. La loi n’interdit en effet pas aux femmes de se porter candidates. La justice administrative se met en marche dans les semaines qui suivent : la Préfecture invalide son élection au motif qu’elle est une femme ; Joséphine Pencalet conteste cette décision devant le Conseil d’État. Ce pourvoi lui permet de siéger au conseil municipal de Douarnenez jusqu’à la confirmation de l’annulation de son élection le 27 novembre 1925. Restée par la suite à l’écart du jeu électoral, elle meurt à Douarnenez en 1972.
Texte de Fanny Bugnon, auteure de « L’Election interdite – Itinéraire de Joséphine Pencalet, ouvrière bretonne (1886-1972) », 2024, éditions Seuil